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Ces très chers encombrants alliés

musikanda
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Tous les politiciens congolais l’ont compris. Pour exister, plus besoin de chercher midi à 14 heures. Il suffit de taper sur Sassou.  Conformément à ses vœux les plus chers, l’autocrate au pouvoir est tellement aimé de son peuple que n’importe quel timbré qui se dit opposé à sa volonté de mourir au pouvoir est assuré de connaître son heure de gloire. Par les temps qui courent, s’opposerà l’Homme des masses ne coûte pas cher, mais peut rapporter gros.

Le dernier en date à s’être livré à cet exercice d’opposant autoproclamé est l’inénarrable Okombi Salissa. On ne savait pas cet humaniste, qui s’est taillé une solide réputation de chien de guerre dans les rangs des  célèbres cobras, si attaché aux valeurs démocratiques. Seuls les imbéciles ne changent pas d’avis. Reconnaissons donc à Okombi Salissa au moins cette qualité-là. Mais  de l’entendre présenter Sassou comme un traître comme s’il ignorait tout de ses intentions, et de le voir se pavaner comme un homme vierge de tout passé, il y a comme un malaise. Sans vergogne, il oublie ou fait semblant d’oublier que sans Sassou, il n’existerait pas. En effet, pour services rendus (pendant la guerre civile), l’Homme des masses a fait de cet ancien étudiant en Union Soviétique sans boulot un ministre, lui permettant ainsi de passer du jour au lendemain de la galère du chômage dans les rues de Brazzaville aux ors de la République.

Je ne lui fais pas de procès d’intention, mais tout prête à croire qu’il n’a jamais pardonné à Sassou de l’avoir viré du gouvernement, montrant par-là qu’il n’était pas indispensable à son régime en quête de respectabilité. Pas chien, il lui a tout de même laissé un point de chute au parlement pour continuer à vivre confortablement aux frais du contribuable.  Est-il aussi mauvais que cela, ce Sassou ?

Que retient-on finalement de la fameuse déclaration d’Okombi Salissa ? A vrai dire, pas grand-chose à part son constat fort juste selon lequel le pouvoir fait des  « paysans, pêcheurs, cultivateurs, chasseurs », des « sages du droit constitutionnel » de qui il attend des « propositions de réformes. » Des « sages du droit constitutionnel » grassement payés évidemment. Constat juste, c’est vrai, mais je note aussi son mépris pour ce petit peuple qu’il qualifie de « rebuts de la société » parce qu’il accepte l’argent de Sassou. Voilà qui vous situe un personnage !

A y réfléchir un moment, la sortie de Okombi Salissa nous apporte tout de même un enseignement non négligeable sur les rapports de force du moment entre le pouvoir et son opposition. En pointillé, il apparaît clairement que Sassou ressemble aujourd’hui à un vieux lion édenté qui ne fait plus peur parce qu’il n’a plus ni les moyens ni la force de mordre. La lucidité de quelques dignitaires du PCT se heurte malheureusement aux jusqu’-aux-boutistes de son clan qui ont tout à perdre avec un départ de Sassou du pouvoir. La manne du pétrole, le trafic du bois, les marchés publics, la main mise sur l’appareil d’Etat et sur l’armée. Vous imaginez son petit con de fils sans la tirelire de la SNPC ? Et Bouya sans l’accès illimité aux fonds d’investissement qu’il dépense à sa guise ? Que dire d’Okémba, pour qui la sécurité du pays repose sur ses épaules ? Ou encore de Ndénguet, qui se prend pour Edgar Hoover ? Et si Sassou n’était plus que l’otage de son clan, qui se sert de lui pour conserver ses privilèges ?

Loin de moi l’idée de semer la discorde entre tous ceux qui s’engagent à mettre un terme au règne de Sassou. Mais il y a des alliés encombrants en compagnie desquels je ne souhaite pas m’afficher. Okombi Salissa est de ceux-là. Quel crédit apporter aux hommes qui n’ont jamais remis en cause leur appartenance au PCT, ce même parti qui soutient mordicus les projets de tripatouillage de la constitution par  Sassou ? Le plus étonnant, c’est de voir les Mierassa et autres opposants de longue date au régime se précipiter sans réserve au domicile de Okombi Salissa comme pour lui apporter sans réserve leur caution à son vernis démocratique. Les conversions rapides ont toujours quelque chose de suspect. Méfiance.

Musi Kanda

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