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Sassou : au pays des pieds devant

politique
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De toutes les opérations militaires entreprises dans le Pool, théâtre des exactions contre l'humanité, aucun bilan officiel n’est véritablement publié à ce jour. Malgré de nombreux morts que les autorités congolaises peinent à avouer, les villages détruits et rayés de la carte sont là pour témoigner de l'humiliation subie et de manque d'humanité du régime.

Après plus de trente-deux d’exercice du pouvoir autocratique, le niveau d’abomination atteint ne pousse plus aux commentaires d’antan. A Brazzaville, l’heure n’est plus aux conjectures, ni à la recherche des raisons de l’hérésie de leurs gouvernants. Mais l’on se questionne davantage sur les clés permettant de se défaire de cette féroce dictature, en l'absence des dieux du ciel.

 Les rares organisations des droits de l'homme présentes dans la capitale congolaise tentent courageusement d'alerter l'opinion internationale du génocide qui se déroule à huis clos dans le Pool. Mais en vain. Comme d'habitude, celle-ci détourne son regard aussi longtemps que les intérêts des ex-puissances coloniales ne sont pas réellement menacés.

 Cela fait donc un an que le pouvoir de Brazzaville qui jurait vouloir «moderniser» les institutions du pays, pourchasse les paisibles populations du Pool. Bombardements, liquidations systématiques et exactions en tout genre se succèdent sans discontinuer et cela sans témoin. Ce drame plonge le pays dans un amas de contradictions et de compromissions sans précédent.

 De toutes les opérations militaires entreprises dans le Pool, théâtre des exactions contre l'humanité, aucun bilan officiel n’est véritablement publié à ce jour. Malgré de nombreux morts que les autorités congolaises peinent à avouer, les villages détruits et rayés de la carte sont là pour témoigner de l'humiliation subie et de manque d'humanité du régime.

Emmurées dans le mensonge et le déni, les autorités congolaises usent abusivement d'une rhétorique des démocrates afin d'espérer se défausser de leurs responsabilités pourtant évidentes. Quoi qu'il en soit, le sol congolais fourche d’innombrables restes cadavériques injustes.

 Après Marcel Tsourou, Modeste Boukadia, un vrai prisonnier politique comme des centaines autres, se trouve à la porte de la mort. L'on se demande en quelle langue faudrait-il parler à ces autorités congolaises afin qu'elles consentent à l’évacuation sanitaire Modeste Boukadia ?

Les barons du pouvoir tombés en disgrâce, ou ceux qui sont passés à l’opposition pour en devenir les devanciers, font actuellement, eux aussi, l’amère expérience de la cruauté du régime qu’ils avaient contribué à installer et auquel ils ont appartenu. Au pays de l’arbitraire, la prison n’est rien d’autre que l'antichambre de la mort et l'hôpital en est un mouroir. On en sort les pieds devant.

 L’opposition dénonce les assassinats, l’arrestation et l’empoisonnement des candidats de l’opposition, les rafles suivies de tortures des dirigeants et militants de l’opposition, le harcèlement politique des responsables, des cadres et militants de l’opposition, la réduction de l’opposition au silence par tous les moyens, … Bref, le Congo est bien une dictature.

 L’un des grands dangers, c’est la lassitude. Celle-ci pourrait contraindre les congolais à baisser les bras et s’acclimater face à ces crimes dont la justification réside exclusivement dans la pure folie. C'est aussi ce silence des citadins. Dicté par la peur, loin d'une quelconque approbation, il accentue la solitude des populations du Pool.

La combinaison de ces deux éléments tend à condamner pour longtemps les habitants du Pool à vie d'errance. Il convient de protester vigoureusement tant la forêt, dernier rempart des malheureux paysans en fuite, ne peut décemment devenir une adresse néo-domienne pour les rescapés de cette barbarie. Un pays sans justice ne peut prétendre à la paix.

Chaque jour l’on déplore des morts. Des morts engloutis dans le fleuve qui jouxte la ville. Des morts dans les hôpitaux réputés mouroirs. Des morts par des bébés noirs. Des morts sur le front du chômage. Des morts partout … Plus jamais le Congo ne publie le taux de mortalité, ni celui du chômage. Il aurait vaincu le chômage de masse, dit-on !

Le pouvoir de Brazzaville semble ne pas savoir quoi faire de ce mandat additionnel frauduleux qu'il s'est octroyé. Le pétrole et son corollaire le sang ne coulent davantage que l’eau rare du robinet. Combien de barils de larmes les congolais auront versé au terme de ce régime ? Le délabrement de l’école où une salle de classe compte en moyenne près de deux cents élèves assis à même le sol est une scandaleuse illustration d’une régression inouïe.

 Il aura sans doute « battu » Mobutu qui régna 32 ans à la tête de ce grand Congo qu’il appela Zaïre. Lui a élu domicile sur l’autre rive du fleuve Congo, dans le Pool Malébo où les deux capitales, Kinshasa et Brazzaville, s’apitoient sur leurs malédictions.

 Pendant qu'il méprise ses concitoyens, Sassou a choisi de vénérer le colon, à qui, il a dédié un mausolée onéreux contrairement à Mobutu qui prônait l’authenticité ou le retour aux sources. Marcher sur les cadavres de ses concitoyens pendant que l'on dilapide les richesses du pays au travers des persécutions, nous renvoie à nouvelle colonisation.

 L’état protecteur des citoyens, des biens, meubles et immeubles s’est effondré au profit d’un environnement corrompu et tribalisé sacralisant l’impunité et l’hégémonie d’un clan. Rapporté à la densité démographique et à l’immensité des richesses économiques potentielles du pays, l’échec est patent.

 Abraham Avellan WASSIAMA