27
Sam, Avr
0 Nouveaux articles

Sassou : le « goût du sang » et le désir de vouloir en faire couler davantage

politique
Typography
  • Smaller Small Medium Big Bigger
  • Default Helvetica Segoe Georgia Times

Tribune libre

Lors de sa récente visite dans le département du Pool, celui qui nous tient lieu de président de la République a fait une déclaration d’un très mauvais goût, aux relents de menace à peine voilée proférée à l’encontre de tous ceux qui l’empêcheraient de mener à bien son projet de changement de la constitution, et donc son ambition de mourir au pouvoir. Dans un style qui laisse à désirer comme il en a le don, le « guerrier » qui n’a cessé de blesser les autres pendant des décennies a raconté comment certains de ceux qui ont été blessés lui auraient avoué que connaissant désormais le « goût du sang », ils ne seraient plus prêts à recommencer l’aventure de tenir tête à  lekufé ».

Le gestuel un peu désordonné, brutal même, et toujours habile dans l’art d’attribuer ses pensées à autrui, question de ne rien assumer, Sassou a utilisé une métaphore basée sur le sang pour effrayer quiconque nourrirait des velléités de le contrarier dans son projet hasardeux de changer la constitution.

Ses propos sanglants ont semé le désarroi auprès d'un auditoire qui mesurait, plus que lui, la monstruosité des propos que tenait ce « guerrier ». Filer une telle métaphore devant des familles endeuillées par sa folie guerrière apparaissait incompréhensible.

Donc selon l’histoire, sans doute inventée par son esprit sanguinaire, et racontée par le président-guerrier, des représentants des anciens combattants du Pool, du Niari, de la Bouenza, ceux qui se battaient contre lui, seraient venus lui raconter lors de ses consultations jugées inutiles par presque toute la communauté nationale, qu’ « on ne connaît le goût du sang que lorsque l’on s’est blessé à la langue ». Diantre !       

  Ceux qui n'ont pas encore goûté à çà, demandez la recette à Sassou

                                                                                                                {youtube}https://youtu.be/IpwGTy_FDTc{/youtube}  

Preuve est faite qu’il faudrait repasser pour voir un président digne, compatissant, ayant à cœur l’unité du pays. Nous avons plutôt face à nous un homme qui a choisi d’entrer dans l’histoire comme le guerrier qui a instauré la violence comme seul moyen d’accéder au pouvoir et d’y rester. Là où un homme d’Etat aurait présenté des excuses pour les torts causés et demandé pardon à une communauté qui a tant souffert, le président-guerrier a choisi, lui, de retourner le couteau dans la plaie.

Contrairement à sa métaphore au goût du sang, qui ne serait connu que par ceux qui se sont déjà blessés sur la langue, la violence politique comme sa méthode privilégiée d’accession au pouvoir au Congo est connue de toute la nation. Depuis la période de l’assassinat du président Marien Ngouabi, prétexte qui avait permis de liquider le président Massamba-Débat, le cardinal Biayenda et d’autres citoyens beaucoup moins illustres mais aussi tout aussi innocents, jusqu’aux tueries perpétrées chez Ntsourou en passant par les assassinats politiques par empoisonnement des années 80, la guerre déclenchée le 5 Juin 1997, les Disparus du Beach et les rafles dans les quartiers sud de Brazzaville, le Congo n’a fait que connaître le « goût du sang ».

Comble de l’ironie, beaucoup d’observateurs suspectent que c’est cette histoire jalonnée de violences politiques qui explique son obsession à vouloir changer la constitution et son penchant à s’embourber dans des violences futures. Il lui faut l’immunité présidentielle afin de rester un homme libre capable non seulement d’utiliser des métaphores douteuses mais aussi de jouir de l’argent amassé pendant toutes ces années.

En réalité, en utilisant la métaphore faite à Kinkala, le président-guerrier est moins préoccupé par ceux qui se sont blessés dans le passé. Son attention se focalise sur « des hommes qui rechercheraient la violence et qui ne connaissent pas le goût du sang car ceux-là ne se sont jamais blessés à la langue. » Le président a promis d’attendre que ceux-là « remontent à la surface ». Ainsi il les « verra tous ».

Le problème du président-guerrier est que les acteurs politiques d’aujourd’hui n’ont sûrement pas l’intention d’aller sur son terrain de prédilection. Ils utiliseront plutôt utiliser le jeu démocratique, lequel est son talon d’Achille. Avec une opposition qui apprend à s’organiser et une jeunesse qui en a ras-le-bol d’être sacrifiée, c’est plutôt lui, le président-guerrier, qui pense à la violence comme unique moyen pour sauver sa présidence à vie.

BLOG COMMENTS POWERED BY DISQUS