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Défendre le droit et l’éthique : un devoir pour la femme congolaise

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Par Gisèle Patricia GOULOU 

La femme congolaise, longtemps cantonnée dans ses fonctions traditionnelles de ménagère, a progressivement bénéficié d’une reconnaissance indéniable de son statut de femme moderne. Par un ensemble de lois, parfois consécutives à des chartes et accords internationaux, celle-ci s’est vu octroyer des droits, qui concourent indubitablement à son émancipation.

Malgré le sex-ratio qui demeure scientifiquement à l’avantage des filles, la gent féminine peine à s’affirmer dans nombre de catégories socioprofessionnelles. Dans les faits, l’application des textes de lois, en faveur de la femme, n’est pas systématique, moins encore rigoureuse. Comme pour le droit au Congo en général, les droits de la femme, quand bien même sont reconnus dans certains cas, ne sont pas autant respectés qu’ils le devraient. Est-ce par perfidie ou par incurie ? Toujours est-il que la femme, encline au modernisme et au savoir, s’imprègne de plus en plus de ses droits et les fait valoir dans la mesure du possible.

 

La défense du droit par la femme congolaise

Quel que soit le domaine du droit, toutes les lois se rapportent à la Loi fondamentale, tout du moins, y sont conformes. La Loi fondamentale, qui est de facto la Constitution d’un État, en l’occurrence celle du 20 janvier 2002 en vigueur au Congo-Brazzaville, se place au-dessus de toutes les lois et de tous les citoyens, sans exception aucune. En tant que principe suprême, elle prévoit des règles pour la coordination et le fonctionnement des institutions de l’État. Elle s’appuie foncièrement sur la garantie des droits et la séparation des pouvoirs entre le législatif, l’exécutif et le judiciaire.

Dans son préambule, la Constitution congolaise énonce ce qui suit :

«…Nous, Peuple Congolais,

Proclamons notre ferme volonté de bâtir un État de droit et une Nation fraternelle et solidaire ; Condamnons le coup d’État, l’exercice tyrannique du pouvoir et l’usage de la violence politique, sous toutes ses formes, comme moyens d’accession au pouvoir ou de sa conservation ;

Adhérons aux valeurs universelles de paix, de liberté, d’égalité, de justice, de tolérance, de probité et aux vertus de dialogue, comme références cardinales de la nouvelle culture politique ;

Réaffirmons le caractère sacré de la vie humaine, le droit de propriété et le droit à la différence ;… »

S’agissant de la question du changement ou non de la Constitution, qui est le débat houleux en cours dans la société congolaise depuis plusieurs mois, il se trouve que ses textes ne prévoient que sa révision dans le titre XVIII. Cependant, ces derniers font prévaloir l’immutabilité de certaines dispositions, comme suit : « La forme républicaine, le caractère laïc de l’État, le nombre de mandats du Président de la République ainsi que les droits énoncés aux titres I et II ne peuvent faire l’objet de révision ». Ces dispositions sont donc immuables, au risque de porter atteinte à l’intégrité du territoire.

Dans la situation sociopolitique actuelle, caractérisée par l’absence d’un conflit inopiné, majeur, puis perdurant, le changement de la Constitution, quel qu’en soit le procédé, ne saurait être apprécié autrement que comme un coup d’État, d’après le droit constitutionnel.

En considération du droit à la différence, le débat ad hoc devrait être solennellement tranché, entre les approbateurs et les désapprobateurs du changement de la Constitution. De surcroît, la femme congolaise devrait activement intervenir dans ce débat, d’autant que les conséquences imprévisibles, d’un éventuel conflit pouvant advenir en cas de violation de l’ordre constitutionnel, seraient principalement subies par elle, en sa qualité d’épouse, de mère et surtout de personne hautement exposée. Par l’entremise de la femme, il faut espérer qu’enfin la raison prime sur la déraison, et l’intérêt général sur l’intérêt particulier, afin que la bonne marche de la démocratie pluraliste au Congo, accorde à ce beau pays une place de choix dans le concert des Nations.

Au-delà de la promulgation de la loi, il sied d’adjoindre la volonté des politiques pour son application, et le cas échéant pour la sanction prévue à cet effet. Or, il n’est pas rare de relever des manquements dans l’application du droit, voire même dans le respect de la loi. Le contenu du titre III de la Constitution, est très éloquent à ce sujet, précisément en ses articles 47 et 48, ci-dessous cités :

« Les biens publics sont sacrés et inaliénables. Tout citoyen doit les respecter scrupuleusement et les protéger. La loi fixe les conditions d’aliénation des biens publics dans l’intérêt général.

Tout acte de sabotage, de vandalisme, de corruption, d’enrichissement illicite, de concussion, de détournement ou de dilapidation des deniers publics, est réprimé dans les conditions prévues par la loi. » ;

« Tout citoyen, élu ou nommé à une haute fonction publique, est tenu de déclarer son patrimoine lors de sa prise de fonctions et à la cessation de celles-ci conformément à la loi.

L’inobservation de cette obligation entraîne la déchéance des fonctions dans les conditions fixées par la loi ».

À quoi sert-il donc d’instaurer des lois, pour qu’elles soient impunément enfreintes, et généralement par ceux-là mêmes qui devraient veiller à leur respect ?

En tant qu’épouse et mère, par un élan de civisme, la femme a le devoir voire le pouvoir, de faire entendre raison aux siens.

En ce qui concerne les droits de la femme, force est de constater que, non seulement, ils ne sont pas complètement pris en compte, d’où la montée du féminisme ; mais en outre, leur mise en pratique est restreinte voire parfois inexistante, malgré les efforts déployés par les associations pour les droits de la femme. D’une part, ces droits ne sont pas suffisamment respectés, et d’autre part, ils sont crûment insuffisants.

La Constitution congolaise prône l’égalité entre l’homme et la femme, en disposant que : «… La femme a les mêmes droits que l’homme. La loi garantit et assure sa promotion et sa représentativité à toutes les fonctions politiques, électives et administratives ». Malheureusement, la femme est confrontée à de multiples discriminations, qui ne seront effectivement enrayées que, d’abord et avant tout, par les différentes luttes qu’elle mène courageusement, tant sur le plan national qu’international. A ce propos, faute de pouvoir établir une égalité parfaite, entre l’homme et la femme, l’idée de procéder à des quotas serait, somme toute, mieux adaptée.

Cherchant à faire évoluer la loi, en réclamant davantage de droits, la voix de la femme s’élève de plus en plus, pour exiger par exemple l’abolition de la polygamie au Congo. Sur ce point précis, la loi n° 84-11du 09 juin 1984 portant code de la famille, en son article 8, dispose que :

« Il est permis de contracter mariage avec plus d’une épouse dans les limites de la chari’a.

Si le motif est justifié, les conditions et l'intention d'équité réunies et, après information préalable des précédentes et future épouses. L'une et l'autre peuvent intenter une action judiciaire contre le conjoint en cas de loi ou demander le divorce en cas d'absence de consentement ».

Il apparait nettement que cette loi est discriminatoire pour la femme, à qui, en réalité, l’homme impose une coépouse, sans avoir besoin de son consentement. En outre, les méfaits d’une telle union sont partout avérés. Pour donner de l’écho à ses revendications, la femme a fini par demander, sur le principe d’équité, que soit aussi légiférée la polyandrie. Les autorités congolaises ont dû se prononcer, en estimant que les conditions n’étaient pas encore réunies pour l’abolition de la polygamie. Quoi qu’il en soit, la lutte de la femme se poursuit jusqu’à ce qu’elle obtienne gain de cause.

 

La défense de l’éthique par la femme congolaise

En considérant l’éthique comme la science de la morale et des mœurs, mais aussi pour sa finalité, qui est la recherche de bonnes conduites pour un idéal de société, il paraît judicieux de faire un panorama de la société congolaise, pour en déceler quelques traits saillants.

Une analyse empirique tend à montrer ô combien les vices sévissent dans l’indifférence générale. Les antivaleurs sont implicitement promues, à telle enseigne qu’elles ont intégré le mode de fonctionnement collectif admis. Par exemple, la corruption, qui est farouchement dénoncée par les officiels, depuis des lustres, ne cesse de gangrener la société, à tous les niveaux, au sommet comme à la base. L’impression qui se dégage, est que les maux sont désapprouvés pour se donner bonne conscience, d’autant que dans la pratique, c’est le contraire qui se produit. Enfin, la dépravation des mœurs a tendance à supplanter les us et coutumes.

Le drame qui se dessine dans la résignation, est la transmission de ces antivaleurs aux jeunes et futures générations. Lorsque des jeunes évoluent dans un environnement, où la promotion sociale semble se fonder sur le clientélisme, le favoritisme ou le démérite, les partisans du moindre effort foisonnent, toujours en quête d’une opportunité pour être mus par népotisme. C’est ainsi que s’entremêlent la médiocrité, la tricherie et la concussion, au mépris de la loi. En conséquence, l’école, cadre du savoir par excellence, et la formation professionnelle, vecteur de développement des compétences, sont reléguées au second plan.

Par ailleurs, les jeunes filles, principalement, oisives, sans aucun revenu ou ayant une faible rémunération, donc en proie à de rudes difficultés, ou à de vifs harcèlements, sont souvent à la merci des -prédateurs- sexistes, qui les chosifient à loisir. Il n’est point besoin de s’appesantir sur ce phénomène, qui renvoie une image dégradante de la femme.

Dans bien des cas, la dépendance financière de la femme, la rend très vulnérable, au point de s’adonner à des abrutissements, qui lui sont imposés. Son potentiel est ainsi atrophié par le poids des inégalités et injustices sociales. Aussi, devrait-elle se faire entendre constamment, pour créer les conditions, nécessaires et suffisantes, de son autonomie. Toutefois, la femme congolaise demeure la pièce maîtresse du tissu social. À la compagne, comme à la ville, celle-ci fournit un travail incommensurable, en accomplissant son devoir d’épouse et de mère.

En tant qu’épouse, la femme congolaise sait comment parler à l’homme, et l’orienter au mieux, lorsque ce dernier se dévoie. Ne pas le faire, quelle qu’en soit la raison, s’apparente à une faute grave. L’amour et le respect mutuels, qui sous-tendent le lien entre les conjoints, devraient établir entre eux, non pas un rapport de force, mais plutôt un rapport de raison, où bien entendu, quelquefois, c’est la femme qui a raison.

En tant que mère, la femme congolaise a la lourde responsabilité d’éduquer la jeunesse, pour lui inculquer de grandes valeurs, car cette jeunesse constitue l’avenir du Congo. Assurément, une telle jeunesse cultivée, instruite, formée et compétente, est un gage de progrès.

De par sa propension à écouter, discerner et à rationaliser, la femme congolaise devrait s’investir davantage dans la promotion de l’éthique en milieu professionnel. Le but étant que chaque profession soit exercée en toute éthique. Le devoir de la femme pour l’éthique professionnelle, est censé contribuer à l’amélioration des performances, par une réelle prise de conscience, pouvant, à terme, favoriser la culture du résultat, à tout le moins celle du devoir accompli.

En ce qui concerne l’éthique politique, essentiellement, les dispositions relatives à la moralisation de la vie publique, si elles étaient consciencieusement observées, avec le concours de la femme, par sa délicatesse, les griefs portés contre la classe politique ne trouveraient plus d’écho. Cela constituerait une grande avancée en la matière. Quant à l’éthique journalistique, elle recommanderait, par exemple, de transcrire la véracité des faits, rien que la vérité, pour édifier l’opinion. Dans le cas contraire, on tremperait dans la désinformation, ce qui serait une manipulation, tout aussi préjudiciable qu’une torture. Enfin, pour toute autorité dans sa profession, l’exemplarité devrait être de mise.

De tout ce qui précède, il faut reconnaître à la femme congolaise des qualités, aussi bien pour le droit que pour l’éthique, lesquelles sont susceptibles de contribuer significativement à l’émergence tant souhaitée pour le Congo. Ainsi, mettre en exergue ces qualités, tous azimuts, serait non seulement un devoir, mais aussi et surtout un acte patriotique. Partant, au vu des qualités intrinsèques à la femme congolaise, fédératrice et visionnaire, une nouvelle donne politique ne devrait-elle pas stimuler son accession à la magistrature suprême, tout au moins à la tête d’un gouvernement, d’un ministère régalien, de l’Assemblée nationale ou du Sénat ?

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