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Secouons les chefs de l’opposition

musikanda
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Qu’avons-nous donc fait au bon Dieu pour mériter ça ? Longtemps, j’ai cru que nous avons l’opposition la plus stupide du monde. La forte mobilisation du 27 septembre a failli me faire croire que je m’étais trompé. Hélas, non. Sans rien modifier à son plan savamment étudié, Sassou déroule son projet avec un mépris souverain comme s’il était seul au monde ou dans un congrès du PCT acquis totalement à sa cause. Et pendant ce temps-là, que font les généraux de l’armée mexicaine qui nous servent de chefs de l’opposition ? Ils bavassent. Ils pérorent. Ils font la pose, se lancent et se perdent dans une kyrielle de déclarations verbeuses quand le peuple meurtri par 31 ans d’un pouvoir corrompu attend une réponse forte. Jugez-en.

Lundi 5 octobre : Sassou annonce la date de son referendum comme si cela allait de soi.

Mardi 6 octobre : les chefs de l’IDC-FROCAD improvisent un de ces points de presse inutiles dont ils ont le secret dans un hôtel à Brazzaville. Pour dire quoi ? Que Sassou fait venir des ressortissants de la RDC pour garnir ses meetings. Un scoop. Qu’est-ce qu’on s’en fout ! A quoi s’attendaient-ils donc ? Que Sassou se croise les bras et les écoute papoter en se morfondant dans son palais contre l’impopularité de son régime ? Que le dictateur attende tranquillement qu’on le déloge du pouvoir ? Mais ils rêvent, nos chefs !

Certes, rien n’est jamais facile. Encore faut-il savoir où l’on va, comment on y va, et avec qui ? A les voir agir, j’ai le sentiment désagréable que faute d’une stratégie clairement définie avec une répartition des rôles entre eux, l’improvisation tient lieu de feuille de route. Sans prétention aucune, ils ont, à mes yeux, tout faux tant ils semblent brouillons. Je reconnais que vivant loin du pays, sans être en prise directe avec la réalité du terrain, la critique est facile. Mais ce que j’écris relève du simple bon sens.

Premièrement : leurs points de presse ne servent à rien parce que les médias publics ne relaient jamais leurs interventions. Ils ont eu 18 ans pour se doter de leurs propres moyens d’information (journaux, radios, télévision.) Ils n’ont rien fait à part pleurnicher. Oublions cette connerie aujourd’hui, et parons au plus pressé et au plus efficace. Que faire pour mobiliser ? Occuper le terrain. Comment ? Campagne d’affichage, tracts, débats sur les places publiques pour haranguer la foule. Chaque jour. Matin, midi et soir, dans des lieux parfaitement ciblés en y laissant chacun s’exprimer librement, les partisans du pouvoir compris.

Deuxièmement : le PCT est coutumier de la triche. Sans la triche, Sassou ne serait plus au pouvoir. Ils le savent très bien puisque la plupart d’entre eux sont des anciens apparatchiks de ce parti et connaissent par cœur ses méthodes fondées sur l’intimidation, les accusations les plus farfelues du genre détention d’armes de guerre, les arrestations arbitraires et les procès sans queue ni tête. Que faire ? Organiser la riposte en créant une cellule spécialement dédiée à cet effet avec un porte-parole commun aux deux plates-formes de l’opposition. Ça évite le cafouillage. C’est à lui que reviendrait le rôle d’animer (s’ils y tiennent) les points de presse.

Et pour ne pas se laisser intimider par les nervis du régime, créer une force de réaction rapide animée par un coordonnateur doté d’un réel sens de l’organisation. Le rôle de cette force est de mobiliser rapidement la riposte partout dans le pays. Je m’explique. A chaque fois qu’un dirigeant ou un militant de l’opposition est harcelé par le pouvoir, rameuter en masse nos partisans pour le soutenir et hurler des slogans hostiles au pouvoir. Cette force doit avoir des unités partout composés de partisans préalablement identifiés comme des hommes et des femmes motivés toujours prêts à se retrouver pour faire nombre.

Troisièmement : revoir de fond en comble la communication qui, aujourd’hui, me donne envie de pleurer. Les déclarations comme celle du 6 octobre est lamentable. Il faut en finir avec ce genre de comme qui remonte aux temps diluviens du MNR avec ce « Peuple congolais, l’heure est grave, ce jour, etc., etc. » suivi d’un charabia épouvantable de trois pages qui se termine par « vive la démocratie, vie la liberté, vive le Congo ». Qu’on le veuille ou non, dans le monde pressé qui est le nôtre, plus personne ne prend le temps de lire ce genre de littérature écrite dans un langage périmé. Ce type de communication est à bannir. Ce qu’il convient de faire : photographier, filmer, interviewer les Congolais dans la rue, dénoncer les agissements des barons du régime et diffuser le tout en temps réel sur les réseaux sociaux. Exemple, l’opposition dit que le régime loge à Kintélé des Congolais de l’autre rive payés pour garnir son meeting. Très bien. Mais où sont les photos, les témoignages qui en apportent la preuve ? Il ne suffit pas de le dire. Il faut en faire la démonstration documents à l’appui.

Quatrièmement : qu’ils cessent d’avoir en permanence le mot président de la république à la bouche en parlant de Sassou. Dites Sassou tout court. Ou Monsieur Sassou s’ils tiennent à être polis. L’autocrate, pour ceux qui veulent être plus près de la réalité, reste le terme exact et recommandé.

Cinquièmement : arrêter d’en appeler aux puissances étrangères. Aide-toi et Dieu t’aidera. La détermination seule des Congolais chassera Sassou du pouvoir. Appuyons-nous sur elle. Ras-le-bol d’entendre parler de Hollande ou d’Obama, qui ne feront rien pour les Congolais. Sassou le sait. Gagnons d’abord la confiance de l’immense majorité des Congolais. Popularisons ensuite notre message en Afrique en étant en permanence présents sur les réseaux sociaux.

Et pour finir, une question. Pourquoi attendre jeudi pour se retrouver en réunion de crise ? Quatre jours après l’annonce de Sassou, vous vous rendez compte ? Ce sont quatre jours de perdu. C’est dans l’heure, messieurs, qu’il vous aurait fallu vous retrouver pour décider de la riposte. Là, rien. Nada. Zéro pointé. Si c’est avec une telle passivité que vous pensez nous débarrasser de Sassou, vous pouvez aller vous rhabiller, messieurs. Mieux vaut tard que jamais, mais c’est le genre de connerie qui coûte cher. Battons le fer tant qu’il est chaud. Et imposons notre calendrier. Ne jamais attendre que le pouvoir fasse un pas pour bouger. Bougeons en permanence. S’arrêter de bouger, c’est mourir. Bougeons. Dès aujourd’hui. Demain, ce sera trop tard. En clair, des meetings. Encore et toujours des meetings. Peu importe leur forme. Minis. Moyens. Mégas. Mais des meetings. Dans les quartiers. Dans les villages. ’Tous les jours. Jusqu’à la chute du tyran.

Musi Kanda

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