… Et pourtant, Dieu n’a jamais été corrompu. Mais alors, que cherchent-ils en tentant de troubler, une fois de plus, le sommeil éternel du Cardinal Emile Biayenda ? Choquer, frapper les esprits et intimider la population pour mieux l’asservir ?
En effet, le défunt prélat fut assassiné, à l’âge de cinquante ans, une nuit, en plein couvre-feu à la suite de l’assassinat du Président Marien Ngouabi. C’était en mille neuf cent soixante-dix -sept. Il fut enterré vivant … Ce meurtre dont les soupçons n’ont cessé de s’orienter vers les instances dirigeantes, n’a jamais été élucidé.
La profanation survenue dans la nuit 23 au 24 décembre 2021, selon les responsables catholiques, a suscité de l’émoi dans le pays. Ces derniers ont porté plainte à la suite de ce sacrilège. Les populations déplorent régulièrement des vandales qui violent le caractère sacré des tombes dans les différents cimetières du pays. Combien sont-ils ? Nul ne le sait. Que fait la police ?
La profanation de la sépulture de cet illustre personnage que fut le cardinal peut-elle être l’œuvre d’un petit voyou ? Pas si sûr.
La classe dirigeante majoritairement formée de fétichistes se remettrait-il à croire à une puissance issue des ossements humains pour contrôler le pouvoir politique ?
La crise multidimensionnelle (manque de visibilité dans la succession du pouvoir, retards de paiements des salaires et pensions suscitant des tensions sociales dans le pays, difficultés de conclure de façon décisive avec le FMI et de relancer l’économie etc.) dans laquelle est plongé le pays pousserait-elle les instances dirigeantes à recourir aux pratiques les plus abjectes ?
Dans ce pays pourtant très policier, il n’y a pas que les tombes qui sont profanées.
La Constitution du pays, texte sacré s’il en est, subit régulièrement, lui aussi, des violents liftings. Comparable à un brouillon d’écolier que l’on rature jusqu’à la marge, elle se voit traiter comme un vulgaire papier sans trop de valeur aux yeux de ceux-là mêmes qui devraient en garantir l’application. Et, chaque modification du texte fondamental coïncide avec le pouls dictatorial.
En 2015, au prix du sang, l’on modifia la Constitution afin que cette dernière soit en concordance avec la volonté de Sassou, lequel avait atteint l’âge limite de sa propre Constitution, de demeurer au pouvoir. Le pouvoir de Brazzaville arguait qu’en cela, il modernisait les institutions. Un mandat de cinq ans creux et vide.
Aujourd’hui, l’homme est fatigué mais reste alerte sur la question de la conservation du pouvoir.
En effet, ce dernier lui assure une protection tant il se sait passible d’accusations de haute trahison. La mise en orbite à pas forcés de son fils, « Kiki le pétrolier », au gouvernement est peut-être le premier acte de la préparation d’une succession de père en fils, pour une protection de toute une famille empêtrée dans les crimes financiers, notamment dans l’affaire celle dite des biens mal acquis. Une probable modification de la Constitution présentée sous le motif de changement d’un article de ladite Constitution sur l’état de siège et l’état d’urgence, répondrait-elle à ces mêmes préoccupations de la conservation de pouvoir ? Serait-ce le deuxième acte de la succession de père en fils ?
L’argument fallacieux sur la covid-19 ne peut résister aux six cents jours déjà passés depuis le début de la pandémie. En effet, 20 jours d’état d’urgence reconduit trente fois, sans objection particulière, battent en brèche les quatre-vingt-dix jours sollicités.
A Brazzaville et à Pointe-Noire, les Congolais s’interrogent sur les contorsions suspectes du pouvoir à propos de la covid-19, une pandémie a causé trois cent soixante décès jusque-là, selon les chiffres des autorités congolaises. Notons qu’en comparaison, le pays enregistre plus de mille cent décès dus aux accidents vasculaires cérébraux (AVC), près de huit cents décès des femmes à l’accouchement, et plus de cinq mille sept-cents décès dus au paludisme...
C’est dire que le pouvoir de Brazzaville semble agir en fonction du calendrier électoral français, histoire d’obtenir l’aval de l’ex-puissance coloniale sur la question modification de la Constitution. On se souvient tristement de l’acquiescement de François Hollande à ce sujet en 2015.
Le congolais lambda pense que la visite en Suisse de Sassou pour y subir « une batterie d’examens » participe de cette effervescence à retoucher une fois de plus la constitution. Aurait-il des informations de résultats médicaux inquiétants sur santé tenus secrets ? La question est posée.
A Brazzaville, il ne fait pas de doute pour l’homme de la rue que l’éventualité d’une modification express de la Constitution trouve sa justification dans la préparation d’une succession dynastique du pouvoir. Les dictateurs françafricains n’ont, généralement, pas le courage d’assumer médiatiquement ce qu’ils sont. Alors, ils se parent de la rhétorique des démocrates. Ils s’accrochent à la tête du pays sans projet de société réel. C’est le cas au Congo-Brazzaville, pays pétrolier surendetté, ruiné et miné par la corruption.
Abraham Avellan WASSIAMA
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