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Congo-Covid-19 : l’odeur de l’oseille serait-elle en train de changer l’approche des autorités ?

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Depuis que le ministre des Affaires étrangères français Yves le Drian a annoncé une aide financière de la France destinée à l’Afrique, afin que le continent puisse faire face à la pandémie - le secrétaire général de l’ONU a fait une annonce dans le même sens -, le comportement des autorités congolaises a changé du jour au lendemain. Le dictateur, qui s’était terré dans son palais d’Oyo est apparu en public.  Les chiffres assez faibles de cas de contamination ont été revus à la hausse et, surtout, là où la propagande officielle parlait de « cas importés », elle annonce désormais des contaminations qui ont lieu sur le territoire national.

L’absence de leadership de la part du président dans la lutte contre la propagation de la pandémie a même suscité des spéculations en tout genre. 

Certains congolais ont annoncé qu’en ce mois de mars, la déprime, qui touche le monde entier pour cause de propagation du Coronavirus, serait vécue durement du côté de la ville d’Oyo car le célèbre habitant de cette bourgade aurait été testé positif au Covid-19. 

 Cette information bien que plausible n’est pas vérifiable. Il est vrai que le président est un humain comme tout autre. Il a, de surcroît, organisé des rencontres internationales inutiles, le dernier au début du mois de mars sur la crise libyenne, en pleine propagation du coronavirus, s’exposant ainsi à une éventuelle contamination.

Mais il est vrai que dans un pays où la culture de la transparence n’a jamais prospéré, ce n’est pas sur un sujet comme celui-là que le gouvernement congolais communiquerait.

D’autres congolais ont expliqué le mutisme du président autoproclamé ces dernières semaines par l’incendie criminel qui a dévasté en partie la villa Suzette en région parisienne, dans la nuit du samedi 14 au dimanche 15 mars dernier.

Selon eux, l’homme aurait été affecté par ce geste provocateur. Il ne comprend toujours pas la facilité avec laquelle les malfaiteurs ont pu déjouer le système de sécurité installé à grands frais, pour s’introduire dans la villa, la taguer avec des messages politiques, puis incendier les véhicules stationnés dans ce domaine de 500 m². « Sassou dégage. Le Congo libre », « Sassou assassin », voilà ce qu’on pouvait y lire, à la grande fureur du propriétaire d’un domaine à propos duquel lequel le journal français « Libération » du 29 avril 2008 écrivait que pas moins de 3 millions d’euros avaient été investis pour le rendre au goût de l’homme d’Oyo.  Un sacrilège !

La déprime de Sassou serait due également aux négociations jusque-là infructueuses entre le gouvernement congolais et les traders pétroliers.

En effet, après avoir signé un accord financier avec le FMI, l’homme a cru que les robinets étaient ouverts et que les billets de banque allaient pleuvoir à Brazzaville, sans qu’il ne fasse aucune réforme car, pour lui, les 48 mesures d’assainissement de l’économie dictées par le Fonds n’étaient là que pour la forme.

Contrairement à l’initiative PPTE dans laquelle le FMI s’était fait rouler dans la farine, cette fois-ci l’institution monétaire internationale a tenu à mettre un peu plus de sérieux dans le traitement du dossier congolais. Pas de cadeau sans contrepartie !

Le point d’achoppement actuel tourne autour des négociations sur la dette congolaise avec les traders pétroliers, laquelle rend toujours insoutenable le service de la dette.

L’homme d’Oyo, après maints atermoiements, s’était résolu à missionner le DG de la SNPC pour des négociations avec Trafigura et Glencore, les deux principaux traders qui ont préfinancé le Congo ces dernières années. Il est vrai que le FMI avait envoyé un signal fort en refusant de réaliser le versement de la deuxième tranche de 45 millions de dollars attendue au mois de janvier 2020…

Hélas, Les deux traders opposent pour le moment une fin de non-recevoir car ils sont mécontents que le Congo ait utilisé les cargaisons qui leur étaient promises dans le cadre du remboursement de leurs créances, à d’autres fins, notamment pour d’autres préfinancements avec un nouveau entrant dans le secteur pétrolier du Congo, Mercuria.

Sans avancée avec le FMI, pas de financements de la part des autres bailleurs de fonds aussi bien bilatéraux que multilatéraux. Voilà la quadrature du cercle devant laquelle se trouve le clan.

Pour compliquer encore les choses, la crise économique et financière mondiale consécutive à la crise sanitaire du Covid-19 a fait chuter les prix du pétrole brut. Le baril a perdu les deux-tiers de sa valeur pour tourner autour d’une vingtaine de dollars à peine vers la fin du mois de mars. A la fermeture des marchés le vendredi 27 mars ? le baril se négociait à 21,51 $ pour le WTI et à 24,93 $ pour le Brent livraison mois de mai 2020. Ce niveau exceptionnellement bas du prix du baril représente plus que la moitié des prévisions du prix du baril du gouvernement fixé à 55 $ pour le budget 2020. Et ce n’est peut-être pas fini ! Tous les grands pays consommateurs de pétrole ayant choisi le « lock down » partiel ou total comme outil pour endiguer la progression de la pandémie, il fait donc un sale temps à Oyo.

On n’est pas donc pas surpris que du côté du palais soit apparu un nouveau slogan à la faveur de la pandémie : l’effacement de la dette, pour que les pays africains surendettés puissent faire face à la pandémie ! Une chimère, au regard de la crise économique et financière sévère qui s’annonce, y compris dans les pays développés. Mais par temps de disette, il faut faire feu de tout bois, de la prétendue préservation des tourbières de la Cuvette à monnayer avec une découverte fantôme de pétrole dans la région, à l'exploitaion de la crise sanitaire aujourd'hui.

robinet

Dans un tel contexte, il ne fallait donc pas s'attendre à un leadership quelconque de Sassou pour gérer au mieux la crise liée au coronavirus. Même si ce dernier était pour une fois traversé par l’idée de se préoccuper de la santé des congolais, une idée certes étrange pour lui puisqu’elle ne l’a jamais visité pendant des décennies, toutes les politiques prônées dans les autres pays du globe sont quasi inapplicables au Congo.  Le simple fait de demander aux citoyens de se laver les mains suppose l’existence du service de base de distribution d’eau courante, et un petit budget pour acheter du savon. Un petit luxe ici.

EAU

Plus que tout autre président sur le globe, le président de ce pays moyenâgeux apparaît donc comme un homme démuni.

De quoi comprendre que dès l’annonce d’une aide financière de la France ou dans un cadre multilatéral, le « bâtisseur infatigable » se soit précipité pour convoquer son équipe de bras cassés pour un conseil des ministres, là où dans tout autre pays la réunion se serait tenue par téléconférence.  On vous passe les détails de tous les membres du gouvernement qui se font mettre un masque, sans gants, par des employés, en leur touchant le visage. Principale décision du conseil des ministres ?  Le président s’adressera à la nation dans les 24 heures. Mais pour quoi dire ? Finalement, confinement général de la population, fermeture des établissements scolaires...

Fort bien. Mais, comment feront les employés salariés et les fonctionnaires payés au compte-goutte pour faire bouillir la marmite ? De quoi vivra l’immense majorité de la population qui survit au jour le jour, grâce à la débrouille, au moyen d’un revenu journalier ? Comment les parents illettrés ou, pire, analphabètes, feront-ils, comme le recommande le ministère, pour dispenser des "cours à la maison", à leurs enfants ? Avec quels ordinateurs, quelle connexion internet, inexistante, sauf à un certains prix à partir des téléphones portables, les élèves et étudiants pourraient-ils suivre d'hypothétiques cours dispensés en ligne ? La réalté dépasse la fiction ici.

Certes, nous devons tous, pour nos parents, souhaiter que la crise sanitaire ne s’amplifie pas dans nos pays, sans quoi nous risquons de connaître une hécatombe. Car de ce point de vue, il est vain de compter sur l’aide venue de l’étranger, un pays comme la France se débattant elle-même dans ses propres difficultés d’approvisionnement en respirateurs, masques, gants. Sans compter que l'aide espérée, quand bien même elle arriverait, elle serait bien entendu détournée, pour ne pas changer les bonnes habitudes…

Pour nos gouvernants, le coronavirus, dans la pire des hyopthèses, si l'on y prend garde, pourrait être synonyme de révolte populaire, en ce qu’il est susceptible de mettre à nu toutes les tares de son régime, du système hospitalier inexistant, à la faillite économique et financière de l'Etat. Les frontières des pays occidentaux étant fermées, l’aéroport d’Ollombo ne serait pas d’une grande utilité pour le clan si jamais celui-ci était rattrapé par la maladie ou par la révolte populaire. On en est là aujourd’hui et c'est la grande crainte qu'il nourrit.

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