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Sassou : un accident de l’histoire invictus

Congo B
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 « Le dialogue national » au Congo supplante la Constitution qui, elle, perd sa primauté quoiqu’on en dise. Cette curieuse approche de fixité du régime conserve les hommes tout en faisant évoluer les institutions de république en république, sans le moindre salut. Une quinzaine de constitutions en une cinquantaine d’années, revient, en moyenne, à une constitution tous les 3 ans ! Preuve de bricolage incessant.

Concrètement, au Congo-Brazzaville, l’alternance démocratique correspond à l’inamovibilité du pouvoir qui, lui, fait subir à la Constitution des changements et modifications après « dialogues ». Ce sont donc les constitutions qui se succèdent à des constitutions et donc qui alternent, tandis que la référence est incarnée par l’indéboulonnable président. De fait, il représente la loi fondamentale ! C’est donc lui la loi.

Ainsi, « le dialogue national » supplante la Constitution qui, elle, perd sa primauté quoiqu’on en dise. Cette curieuse approche de fixité du régime, conserve les hommes tout en faisant évoluer les institutions de république en république, sans le moindre salut. Une quinzaine de constitutions en une cinquantaine d’années, revient, en moyenne, à une constitution tous les 3 ans ! Preuve de bricolage incessant.

Des élections auxquelles personne ne croit vont y être organisées à grands frais, sur fond de corruption et de sévère répression. L’opprobre que le pouvoir ethno clanique a jeté sur une partie de sa population et son administration a précipité le régime à un état d’abjection. L’impartialité de l’Etat et sa neutralité relèvent d’une légende, au Congo.

Connus d’avance, ces scrutins infidèles dévoileront, sans rire, des résultats issus d’une prestidigitation trahissant, comme d’habitude, la réalité des urnes. A défaut d’une légitimité avérée, le pouvoir de Brazzaville, vieille d’un demi-siècle, manœuvre et pipe le jeu démocratique depuis des mois afin d’imposer une légalité de fait visant sa démultiplication.

Sassou a indiqué, lors de la récente veillée d’armes de son armée, que ses troupes sont bien rangées, qui plus est, en ordre de bataille et répondront présentes, le cas échéant. La date du 20 mars choisie n’est pas anodine. Truffée de symboles et d’énigmes, elle correspond à la période des « petits matins » où le pouvoir programmait quotidiennement les exécutions sommaires. Cette date, chargée d’histoires, est donc censée conjurer le sort et exorciser les démons qui ne cessent de hanter du pouvoir.

Cependant, la république ne saurait servir indéfiniment ni de rempart aux dictateurs, ni d’otage pour ces derniers. Leur participation aux élections est une contradiction de fond opérant le blanchiment de leurs forfaits. Cette prime à la violence légalise les bourreaux au lieu de leur délivrer un bail carcéral.

Pourquoi nous servir ce que l’on ne cesse de vomir ? Mais pourquoi, diable Sassou s’offre-t-il un lifting aussi violent qu’une séquence électorale biaisée dont il se serait passé ?

Nul ne peut présager des retournements et rebondissements spectaculaires tant l’avertissement des congolais, lors du méga meeting, en septembre dernier, était si strident. Les indignés et les résignés, les sceptiques et les déçus pourraient, à l’occasion, se réveiller et passer d’un extrême à un autre. Le danger de se retrouver devant une colère populaire non canalisée est considérable, le régime congolais n’ayant jamais permis à une opposition de se structurer.

Cependant, afin de faire illusion, le pouvoir se construit régulièrement une pseudo-opposition. Au pays du simulacre, il appartient à la population de se défaire des crocs de ce régime afin de se donner un nouvel élan et de s’ouvrir les voies des lendemains porteurs d'espoir. La liberté et la dignité sont des marqueurs importants du combat des congolais.

Comparable à une bouteille d’encre, ce qui est proposé aux congolais à l’occasion de ces élections anticipées n’est qu’un avatar démocratique. L’enjeu pour les congolais, cette fois-ci, consiste à se donner du courage et à booster les populations quelque peu endormies afin qu’elles récupèrent leur souveraineté aujourd’hui confisquée.

Pour cela, sans attendre quoi que ce soit, notre général qui reçoit beaucoup d’appels du pied et fait rêver certains congolais doit sortir du bois et de sa pénombre, tout de suite, afin de créer une dynamique dans l’opposition. Les délais sont courts pour s’offrir le luxe d’une attente stratégique. Le temps où l’on allait chercher quelqu’un dans son village, à l’instar du Président Massamba-Débat, est révolu. Portez votre képi et sortez vos griffes, mon Général ! Si vous en avez !

L’hostilité des populations vis-à-vis du régime de Sassou est palpable. Celui-ci tient par l’argent qu’il arrose çà et là et surtout par la répression. Paradoxalement, cela constitue aussi sa faiblesse. Car, il y a des limites.

L’Afrique centrale qui est en passe de devenir un nid de vipères, s’est affaissée, pendant que s’installe une culture de corruption endémique. Manifestement, elle est consciente de la nécessité de se débarrasser de sa fourmilière de dictateurs. Mais s’en donne-t-elle véritablement les moyens ?

La chute du pouvoir de Brazzaville pourrait donner le ton et, par effet d’entrainement, débloquer la situation dans d’autres pays et particulièrement ceux de l’Afrique centrale. Dans leur attitude commune, les dirigeants africains qui ont du mal à passer la main s’inspirent du président congolais.

Le silence de la communauté internationale, ponctué par des actions de circonstance, dénote d’une véritable hypocrisie face à la question africaine. Les dictateurs africains se baladent dans le monde entier sans s’inquiéter, pendant qu’une victime de cette dictature et candidate à l’émigration se voit interner dans un centre de rétention. Et l’on peut s’interroger sur la complaisance de la communauté internationale vis-à-vis de ces crimes organisés, légitimés voire cautionnés.

Qu’avons-nous fait de nos indépendances ? Sommes-nous en phase avec les idéaux qui ont prévalu au moment de l’autodétermination ? Qui sont–ils, ces gens qui nous gouvernent indéfiniment pour un lamentable bilan, et qui peinent à passer la main ? A les entendre parler, tout va bien, alors qu’ils sont complètement à l’ouest !

Abraham Avellan WASSIAMA