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Forfaiture : pour qui sonne le glas ?

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Tribune libre

Aussi surprenant que cela puisse paraitre, la Constitution américaine, l’une des plus anciennes, est, à ce jour, provisoire. Et pourtant, elle fonctionne. En effet, l’important réside dans la qualité des hommes et des femmes débarrassés d’esprit tribal et ayant intégré le sens de l’Etat, la primauté de l’intérêt général face aux intérêts individuels ainsi que le respect scrupuleux des règles garantissant l’équilibre du contrat social et la stabilité des Institutions que l’on se dote.

En découlent les principes et limites impersonnels en faveur de la lutte pour les libertés humaines. Ainsi, en régulatrice de référence de société, une Constitution n’est point « marchandable » au gré des ambitions des hommes en présence tel un espadon soumis à un marché à la criée. Elle s’applique !

L’une des caractéristiques principales d’une dictature se révèle dans sa surdité originelle nourrie béatement par une logique de violence permanente et le sentiment enivrant d’invincibilité. D’où l’obstination des dirigeants politico-militaires (souvent les mêmes) dans des stratégies opaques de conservation de pouvoir et de confiscation des libertés.

La persistance du désastre sur le continent africain s’explique essentiellement par l’oppression et la démultiplication de l’entêtement des dirigeants passéistes, peu scrupuleux, ayant un égo surdimensionné et ne possédant pour seule boussole qu’un consternant slogan longtemps entendu au Congo-Brazzaville selon lequel le pouvoir serait au bout du fusil et qu’il s’arrache. En somme, une dictature n’est que violence.

Ayant miné leurs pays par des systèmes étatiques moribonds et policiers où la corruption frise le paroxysme, les dirigeants africains ne peuvent concevoir l’alternance qui les renverrait au musée dans le meilleur des cas. C’est là aussi que réside leur faiblesse. Car, en face, il y a le peuple longtemps oppressé mais qui demeure, à jamais, le véritable dépositaire du pouvoir.

Mais à l’heure de l’ultime échéance consistant à rendre le tablier au peuple, la quasi-totalité des chefs d’Etats africains subsahariens se transforment en des lamentables contorsionnistes refusant de quitter la scène.

Jeter aux orties la Constitution par des manœuvres dilatoires renvoie, au-delà du parjure, à une réelle forfaiture. Une haute trahison. Ce forfait du serment par le garant de la Constitution s’additionne aux déjà très nombreux crimes restés impunis. Ce fâcheux comportement ne cesse de retarder l’avènement démocratique dans un pays et plus largement dans un continent en proie aux événements les plus poignants de l’aventure humaine.

Au Congo-Brazzaville, pendant que le pouvoir, jadis vomi, feint d’ignorer sa précédente éviction au terme d’une conférence nationale fleuve, et qu’il s’est réinstallé par le biais d’une légalité brouillonne au travers des guerres à répétition et des scrutins auxquels personne ne croit, sa machine à vilénies est en marche. Il convient donc de fédérer, sans tarder, les différentes forces démocratiques afin de résister et de permettre au pays d’ouvrir des réelles perspectives.

De parjures à la forfaiture désormais avérée à travers cette déclaration à « Reuters », le pouvoir de Brazzaville pourrait bien connaître un sort identique à celui de Blaise Compaoré. Les courtisans dudit pouvoir se donnent du courage en arguant que « Brazza n’est pas Ouaga ». Mais en se soulevant, les jeunes burkinabè avaient bien conscience que leur action était teintée d’exemplarité et qu’ils donnaient ainsi le « la » à une Afrique naufragée.

Cet obscur « chemin d’avenir » subrepticement imposé aux congolais sous un label pseudo démocratique demeure un mystère indéchiffrable. Tellement chargé d’énigmes, de scandales et intentions malveillantes, ce mystérieux projet au déficit structurel criard ne pourra résister indéfiniment à la lumière du jour d’un Congo resplendissant.

L’Afrique subsaharienne doit tourner sa roue afin de favoriser une nouvelle classe politique aux mœurs politiques nouvelles proches des citoyens prenant en compte les préoccupations des populations. Certains pays africains semblent s’y résoudre, principalement dans les pays anglophones où l’on note quelques exemples rassurants d’alternance démocratique.

Il convient de noter l’existence de tonalité et d’approche différentes selon que l’on se place dans le giron anglo-saxon ou francophone. La capacité des dirigeants francophones issus de la vieille école coloniale, à s’agripper puis à se carboniser au pouvoir s’apparente à de la folie. Ont-ils toujours (ou encore) leurs oreilles ? Certes, une dictature est autiste, il est vrai. Mais pour qui sonne le glas ?

Longtemps, les clivages tribalistes absurdes servaient de caution à des pouvoirs plutôt corrompus. Le Cameroun, le Congo-Brazzaville, le Zimbabwe, le Congo-Kinshasa, le Gabon, le Togo, la Guinée-Equatoriale … doivent aussi tourner leur page en vue d’une meilleure gouvernance.

C’est en exigeant, sans concession aucune, à ces dirigeants de libérer l’horizon par le respect de leur propre texte fondamental que l’on pourrait espérer boire frais et que les africains passeraient du récurrent cauchemar aux rêves, mêmes les plus fous, où l’utopie constituera l’horizon des possibles.

Abraham Avellan WASSIAMA

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