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Mgr Louis Portella «demande que cessent ces bombardements»

Congo B
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Mon avis c’est que je reste perplexe parce que d’une part la ville est assez bien cernée par les forces de l’ordre. Et les Ninjas, en principe, sont censés avoir été désarmés. Depuis 2007, le Pasteur Ntumi a été intégré dans la structure du pouvoir, puisqu’il était conseiller spécial du président et donc on peut dire que toute la jeunesse qui était autour de lui était censée être réinsérée. Et maintenant, tout d’un coup, on voit ces jeunes qui interviennent. Avec quelles armes ? Point d’interrogation. 

RFI

Que se passe-t-il dans la région du Pool, au sud-ouest de Brazzaville ? Depuis dix jours, de nombreux témoins affirment que des hélicoptères des forces congolaises frappent les positions supposées de la milice Ninja. Monseigneur Louis Portella Mbuyu, évêque de Kinkala, chef-lieu du Pool, est l'invité Afrique de RFI, il répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

RFI : Monseigneur Portella, quelle est la situation dans le Pool ?

Monseigneur Portella : La situation depuis un certain temps, le Pool a connu une situation de détresse du fait des bombardements qu’il y a eu dans certaines localités. Lesquels bombardements ont provoqué l’alarme et les déplacements forcés et précipités des populations. Et ce mercredi encore, il y a eu quelques bombardements non loin de Kinkala, dans le village qu’on appelle Soumouna, un des sites de celui que nous appelons le Pasteur Ntumi. On a entendu le retentissement de plusieurs obus. Et en identifiant un peu le lieu, c’est justement à Soumouna que ces obus ont été largués.

Mais largués par quoi ?

Il semble que c’est un hélicoptère qui est passé.

Est-ce qu’il y a eu d’autres bombardements dans les jours qui ont précédé ?

Oui, à Mayama il y a eu aussi des bombardements et toujours visant le site du Pasteur Ntumi. D’autre part, à Vinza, il y a eu aussi des bombardements. Là, on dit qu’il y a eu erreur de la part des acteurs, puisque c’est le site du Pasteur Ntumi qui avait été visé. Et là, en fin de compte, les obus qui ont été largués ont été largués sur une école, une école primaire. Dieu merci, il était encore très tôt, aux environs de 7 heures et quelques, et donc les enfants n’étaient pas encore là. Il y a juste le directeur qui a échappé de justesse et qui a pu donc se retirer assez rapidement. Et donc il n’y a pas eu de pertes humaines, semble-t-il.

Et ça, c’était où et quand ?

Ça c’était à Vinza. Ça a eu lieu le mercredi.

De la semaine dernière ?

Voilà.

Le porte-parole de la police congolaise, le colonel Jules Monkala Tchoumou, confirme l’utilisation d’hélicoptères par les forces de l’ordre, mais affirme qu’il n’y a pas de bombardements ?

Ce que je sais, c’est que sur le site de Vinza, il y a eu des bombardements, puisque les gens ont entendu jusqu’à vingt à trente coups.

Vingt à trente coups qui ont retenti ?

Qui ont retenti. Voilà.

Vinza, vous pouvez nous en dire un peu plus, Monseigneur ?

C’est un district, un chef-lieu de district, Vinza.

Qui est un district assez éloigné de Brazzaville ?

Oui, assez éloigné de Brazzaville, oui, bien sûr. Et ça a été aussi un des lieux où a résidé le Pasteur Ntumi dans les années 2000-2002, et cetera…

Donc en fait, ce que vous nous dites c’est qu’il y a des bombardements dans le Pool depuis une dizaine de jours, c’est ça ?

Depuis une dizaine de jours, mais on ne peut pas dire que tous les jours.

Est-ce qu’il y a des victimes ?

Pour le moment nous ne pouvons pas le dire. C’est difficile de le dire. Ce que nous voyons, c’est plutôt le déplacement des populations. Par exemple à Mayama, des populations se sont déplacées jusqu’à Kindamba, sans compter ceux qui se sont enfuis dans les forêts. Et à cette occasion justement, nous avons une mission de la Caritas qui vient de démarrer pour aller justement au secours de ces populations déplacées, celles qui sont à Kindamba et celles qui sont à Nkoué.

A l’origine de tout cela, il y a ces combats meurtriers qui ont éclaté le 4 avril dernier dans les quartiers sud de Brazzaville. Le pouvoir accuse les Ninjas du pasteur Ntumi d’être à l’origine de ces violences, mais plusieurs opposants répliquent qu’il s’agit d’un montage de la part du pouvoir. Quel est votre avis ?

Mon avis c’est que je reste perplexe parce que d’une part la ville est assez bien cernée par les forces de l’ordre. Et les Ninjas, en principe, sont censés avoir été désarmés. Depuis 2007, le Pasteur Ntumi a été intégré dans la structure du pouvoir, puisqu’il était conseiller spécial du président et donc on peut dire que toute la jeunesse qui était autour de lui était censée être réinsérée. Et maintenant, tout d’un coup, on voit ces jeunes qui interviennent. Avec quelles armes ? Point d’interrogation. Moi-même je suis dans la confusion. Je me pose mille et une questions là-dessus. Je n’y comprends absolument rien du tout. D’où viennent les armes qu’ils ont maintenant en leur possession ? Point d’interrogation.

Et dans les interventions qui ont lieu maintenant, les bombardements, jusqu’à maintenant il y en a qui sont arrêtés et on a l’impression que les chefs sont tranquilles. Si vous voulez, le drame actuellement c’est les populations elles-mêmes. Vous savez, pour des populations du Pool qui ont connu les affres de la guerre civile 1997-98 jusqu’en 2007 pratiquement, c’est un véritable traumatisme de plus. Et ce que nous avons dit dans notre message, c’est que les forces de l’ordre ont pour mission de protéger les populations. Et tout ce qui se passe actuellement ça met les populations dans une situation de détresse. Ce n’est pas là la mission de l’armée !

Et concrètement, Monseigneur, qu’est-ce que vous demandez aujourd’hui pour cette région du Pool dont vous êtes l’évêque ?

Je demande que cessent d’abord ces bombardements. S’il y a des personnes qu’il faut poursuivre qu’on les poursuive ! Tout en protégeant la population ! Et je crois que ce que nous pouvons demander est au nom des populations du Pool qui vraiment souffrent aujourd’hui ! Que ces bombardements-là cessent ! Parce que d’abord ça n’a aucune efficacité. Maintenant, quant à mettre la main sur les véritables responsables, je ne crois pas qu’on est arrivé à un résultat probant.

Quelques jours avant ces violences, il y a eu la présidentielle du 20 mars et le président Sassou Nguesso a dit alors : « La démocratie est en marche, c’est une élection qui rehausse le niveau de la démocratie congolaise. » Qu’est-ce que vous en pensez ?

Je suis interrogateur sur cette avancée de la démocratie.

Vous n’êtes pas convaincu ?

Pas du tout !

Et Pourquoi ?

Parce que je pense que tout ce qui s’est passé dans les élections, s’est passé dans ce qu’on pourrait appeler un manque de transparence.

© RFI (15/4)

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Brèves

- Pour empêcher la tenue de la marche prévue par l'opposition ce vendredi 15 avril, au boulevard Alfred Raoul, Claudine Munari, son instigatrice, s'est vue notifier son placement en résidence surveillée par les policiers. La résidence de Mokoko et celle d'Okombi Salissa est également cernée par des hommes armés.

- Déclaration du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme : « Les rapports que nous avons reçus sont alarmants et font état de possibles violations des droits de l’homme en République du Congo, en particulier dans le cadre des opérations de sécurité qui sont menées contre des chefs de l’opposition et leurs partisans. Nous avons reçu des informations faisant état d’arrestations massives et même des cas de tortures en détention, ainsi que des informations sur des meurtres et un déplacement massif de population dans le département où se déploient ces forces de sécurité qui est appelé le département du Pool ».

- Une villa appartenant à Louis Bakabadio, conseiller à l’éducation de Sassou, a été incendiée à Kinsoundi par les hordes du pouvoir qui l’auraient prise pour une propriété du pasteur Ntumi…

- A lire, une interview de Benoît Koukébéné : "Monsieur Sassou-Nguesso doit partir"