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Le flou de la grâce présidentielle selon Kolelas

politique
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Suggérer, comme le fait le porte-parole de M. Kolelas, que le procureur classe une affaire alors que ce dernier a déja décidé de poursuivre relève du bricolage juridique auquel un démocrate prétendument respectueux de l’Etat de droit comme Parfait Kolelas ne devrait pas appeler !

Dans un article intitulé « Quand Kolelas sollicite pour Mokoko, auprès de Sassou, une grâce sans objet », Mwinda s’étonnait que le fils de Bernard Kolelas sollicite la grâce présidentielle d’un détenu ni jugé, ni condamné. Votre journal écrivait en effet : « La grâce présidentielle ne bénéficiant qu’à des personnes déjà condamnées suite à un procès, Kolelas considère-t-il l’ancien chef d’état-major d'ores déjà coupable et condamné des « faits très anciens » qu'on lui reprocherait ? Pourquoi fait-il semblant d'ignorer que le seul grief qui vaut aujourd'hui la détention à Mokoko est d'avoir été candidat à la présidentielle et, pire, d'avoir contribué à éliminer Sassou de ce scrutin dès le premier tour ? Très trouble et équivoque donc le comportement de cet apprenti opposant qui, par ses propos, accrédite l'idée de monsieur 8 % comme le président légitime, puisqu’il va quémander auprès de lui une grâce sans objet ».

En réponse, un porte-parole de Kolelas, en l’occurrence le sieur Manangou, dans un article intitulé : « la conférence de presse de Kolelas : entre critique injuste et cécité politique avérée », a cru bon d’apporter des précisions à la sortie hasardeuse de son patron. Voici ce qu’il écrit :

(…) « Aucune phrase de Kolélas ne fait allusion à cette grâce. Mais, répondant à la question d'un journaliste, il a estimé que le chef de l'Etat congolais pouvait à l'occasion des festivités du 15 août, faire grâce au général Mokoko.

A cette assertion, les critiques ont estimé, à raison, qu'une telle demande n'avait aucun sens, puisque la grâce ne pouvait intervenir qu'après l'épuisement des voies judiciaires. Une telle remarque, bien que fondée en droit, est contestable.

En réalité, obstinés par la volonté de critiquer, ils n’ont pas analysé la profondeur de la pensée du président Kolélas. Que voulait-il dire en parlant de grâce ?

Le député de Kinkala pensait au principe de « l'opportunité des peines ».

Ce principe, « est la faculté reconnue au ministère public, lorsqu'une infraction pénale lui est dénoncée, de déclencher ou de ne pas déclencher l'action publique en fonction des particularités du cas d'espèce ». Il faut en effet souligner que. « le procureur de la République apprécie l'opportunité des poursuites : même si les faits sont constitutifs d'une infraction, il dispose de la faculté de classer sans suite. L’action publique n'est alors pas déclenchée. Le membre du Parquet apprécie cette opportunité en prenant en considération plusieurs éléments tels que la faiblesse du préjudice, l'encombrement des juridictions, la politique criminelle menée au sein d'un parquet etc.... ».

Il s'agit d'une arme entre les mains du procureur susceptible d'abandonner les charges contre le Général Mokoko. Le procureur, nous le savons, n'est que l'exécutant de la politique pénale du Gouvernement. Donc dans le cas d'espèce, outre dans l'appareil judiciaire, le procureur Oko Ngakala à trois chefs : le président de la République, le premier Ministre et le Ministre de la justice. Les trois responsables de la politique pénale du Gouvernement peuvent donc instruire le procureur pour qu'il abandonne les poursuites contre le général.

Il s'agira pour le procureur de simplement prendre la décision de classer sans suite cette affaire. Rappelons que la décision de classement sans suite est considérée comme non juridictionnelle et non définitive. Ceci est d'autant plus simple qu'il n'existe pas de partie civile dans cette affaire, susceptible d'être lésée.

Pour convaincre, que le président Kolélas pensait bien au principe de l'opportunité de peine, il suffit de se rappeler qu'il expliquait que les faits qui étaient reprochés au Général Mokoko dataient et n'étaient pas aussi étayés pour faire l'objet d'une condamnation pénale.

Kolélas avait donc raison, les motifs juridiques et d'opportunités peuvent justifier un abandon des charges. Le président de la République instruirait lors de son discours à la nation le Gouvernement, qui a son tour instruirait le procureur pour classer sans suite les poursuites contre le général Saint-Cyrien » (…).

La réponse apportée par le sieur Manangou nous conforte, à vrai dire, dans l’idée que Parfait Kolélas semble mal conseillé. Il ne s’agit pas ici de chipoter sur des notions juridiques. Au contraire, celles-ci ont des implications telles qu’un homme politique du poids de Kolelas, lequel draine derrière lui de nombreux électeurs, comme l’a démontré le dernier scrutin, devrait se garder de les utiliser à tort et à travers. Surtout que précisément l’homme véhicule une image de flou et d'ambiguité qui lui nuit gravement, y compris vis-à-vis de l’opinion internationale.

Le porte-parole de Kolelas donc, dans l’article précité, recourt à la notion de « l'opportunité des peines » à laquelle Kolelas aurait pensé dans sa réponse à une question à lui posée par un journaliste.

Oui, comme il est noté ce principe « est la faculté reconnue au ministère public, lorsqu'une infraction pénale lui est dénoncée, de déclencher ou de ne pas déclencher l'action publique en fonction des particularités du cas d'espèce ».

Oui, en effet, « le procureur de la République apprécie l'opportunité des poursuites : même si les faits sont constitutifs d'une infraction, il dispose de la faculté de classer sans suite. L’action publique n'est alors pas déclenchée ».

En d’autres termes, quand un procès-verbal d’enquête lui est soumis par la police judiciaire s’agissant d’une infraction, le procureur prend une décision. Soit il décide de poursuivre, soit il classe l’affaire sans suite, soit il prend (c’est le cas en France) des mesures alternatives.

L’ennui pour le sieur Manangou c'est que dans le dossier qui nous occupe, le procureur Oko Ngakala a déjà pris sa décision : il a décidé de poursuivre et non pas de classer l’affaire !

En l’espèce, il a pris des réquisitions et a décidé la présentation de Mokoko devant le juge, lequel a ordonné sa détention provisoire ! En clair, le dossier Mokoko n’est en plus au stade de « l'opportunité des peines » ; il n’est plus entre les mains du procureur mais entre celles d’un juge d’instruction. Ce dernier pourrait soit prendre une ordonnance de renvoi (devant un tribunal), soit prendre une ordonnance de non-lieu, s’il estimait par exemple que les éléments qui nourrissent le dossier d’enquête n’étaient pas probants. Et dans cette dernière hypothèse, nul besoin d'une humiliante amnistie d'un soi-disant président de surcroît illégitime, la décision du juge s'imposant d'elle même.

Suggérer donc, comme le fait le le porte-parole de M. Kolelas, que le procureur classe une affaire dont il n'est plus maître, et alors qu’il a déjà décidé de poursuivre, est une confusion de plus et un non-sens auquel un  démocrate  prétendument respectueux de l’Etat de droit comme Parfait Kolelas ne devrait pas appeler !

En somme, en homme politique responsable, Kolelas ferait mieux de rester dans le registre politique à savoir, en l'occurrence, appeler simplement, comme les autres opposants, à la libération sans condition d’un homme détenu arbitrairement et non pas se fourvoyer dans le bricolage ou dans le maniement hasardeux de notions juridiques mal assimilées.